vendredi 22 mars 2013

Cherche Opportunity Manager (m/f)

Voici l'annonce que j'ai commencé à lire le 19/3 matin (veille de la Journée internationale du bonheur) dans la partie job d'un quotidien :


"Notre organisation recherche un Opportunity Manager (m/f). La mission de la fonction consistera à analyser les opportunités pour les différents départements de votre entreprise, à guider le top management dans l'élaboration d'une stratégie de gestion des opportunités. Il/Elle permettra aux différents départements d'identifier les bonnes pratiques pour valoriser au mieux les opportunités, de susciter la générations de nouvelles idées et d'encourager l'expérimentation de celles-ci  (...)"

Et puis le réveil a sonné... avec l'émission Snooze et le rire de Vanessa Klak à un jeu de mots plus ou moins bon de Sébastien Ministru à la radio.

Ben ouais, ce n'était qu'un rêve mais les rêves, cela a du bon, ils nous permettent d'intégrer un tas de choses de notre vécu tout en rendant l'impossible impossible, ou l'impossible possible ou... enfin, vous me comprenez.

Et si cela devenait réalité. Si on généralisait la fonction d'opportunity management dans les organisations ? Il existe bien une fonction de Risk Manager, vous savez, c'est cette personne qui vous fait remplir un tas de tableau avec un tas d'indicateurs pour évaluer l'impact et la probabilité des risques qui planent au-dessus de vos activités si vous ou votre équipe commettez l'une ou l'autre erreur. (spéciale dédicace à mes collègues Risk & Security)

Je suis réaliste : cette fonction a évidemment du sens (tant que ça ne génère pas une "usine à gaz") et on ne peut pas se permettre de méconnaître certains risques dans le contexte actuel. Cependant, force est de constater que ce point de vue part toujours du principe que les choses ont une certaine probabilité de mal se passer, ce qui permet de développer des actions "correctives", des "bonnes pratiques" qui évitent que les problèmes se produisent (ou le cas échéant, avec le moins de dégâts possibles).

Pourtant, en envisageant uniquement tout ce qui pourrait exister sur la face cachée de la lune, n'oublie-t-on pas de regarder de plus près toutes les beautés que sa face éclatante nous montre ? (je suis un peu poète aujourd'hui...)

Le Voyage dans la lune (G. Meliès, 1902)

Et ce n'est pas une simple question de sémantique. 

En psychologie sociale, Ziva Kunda (1955-2004) distingue deux tendances individuelles qui impactent la motivation, la cognition, les affects, le comportement, etc. de tout être humain : la focalisation sur la prévention (prevention focus) et la focalisation sur la promotion (promotion focus). De façon simpliste (puisque la réalité se trouve sur un continuum), on peut ainsi diviser la population en deux catégories :
  1. Les personnes qui sont focalisées sur la prévention : elles se centrent sur les problèmes possibles ou réels, elles analysent les choses en termes de coûts, de risques et de conséquences négatives possibles. Ces personnes envisagent plutôt le verre "à moitié vide" en envisageant ce qui risque de le vider encore davantage.
  2. Les personne qui sont focalisées sur la promotion : elles se centrent sur les solutions, elles analysent les choses en termes de bénéfices, d'opportunités et de conséquences positives. Elles voient plutôt le "verre à moitié" plein et surtout envisagent les solutions qui le rempliront davantage. 
Ces deux visions (de soi et du monde) induisent des stratégies individuelles différentes. Il en est de même lorsqu'on la transpose au niveau organisationnel. Ces deux perspectives doivent coexister au sein d'une entreprise : alors que la prévention poussée à l'extrême conduit à la paranoïa, à la frilosité, à l'interdiction de faire des erreurs, la promotion poussée à l'extrême peut amener là un déni des risques, à une vision trop "bisounours" du contexte. Le problème est que, même si on réalise parfois une analyse SWOT qui identifie les opportunités et les forces de l'entreprise, les dirigeants sont d'abord enclins à se focaliser sur ce qui peut les mener à la banqueroute, ils laissent les opportunités pour plus tard.

Je plaide donc pour le développement d'une stratégie qui tienne compte à la fois des risques et des opportunités, une stratégie qui s'ancre dans l'anticipation des problèmes tout en ayant une vision sur le panel de solutions et de pistes positives à explorer. Il faut certes développer le Risk Management mais il faut contrebalancer la gestion des risques, p.ex., en mettant en place un pôle d'Opportunity Management qui s'ancre dans l'analyse des opportunités et des forces (présentes et futures). Sans cette vision positive, le top management passera forcément à côté d'un tas de pistes de développement de leur organisation.


Mais le plus important : sans cette perspective orientée sur les solutions et les opportunités, la culture d'entreprise s'ancrera dans la méfiance, les employés n'oseront pas tester de nouvelles choses "out of the box", l'innovation sera bridée par la frilosité. Plus généralement, l'entreprise dans son ensemble sera en décalage avec l'évolution du marché, des technologies, des besoins de ses clients/bénéficiaires, voire de la société.

1 commentaire:

  1. Argh ... à la lecture du premier paragraphe, je me suis dit "C'est où? C'est chez qui?" ... Puis j'ai déchanté comme toi au réveil! :o)

    Par contre, je suis probablement un rien trop du coté "prevention focus" de la barrière ... ;o)

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